Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 14,13-31.
Jésus partit en barque pour un endroit désert, à l'écart. Les foules l'apprirent et, quittant leurs villes, elles suivirent à pied. En débarquant, il vit une grande foule de gens ; il fut saisi de pitié envers eux et guérit les infirmes.
Le soir venu, les disciples s'approchèrent et lui dirent : « L'endroit est désert et il se fait tard. Renvoie donc la foule : qu'ils aillent dans les villages s'acheter à manger ! »
Mais Jésus leur dit : « Ils n'ont pas besoin de s'en aller. Donnez-leur vous-mêmes à manger. »
Alors ils lui disent : « Nous n'avons là que cinq pains et deux poissons. »
Jésus dit : « Apportez-les moi ici. »
Puis, ordonnant à la foule de s'asseoir sur l'herbe, il prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ; il rompit les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule.
Tous mangèrent à leur faim et, des morceaux qui restaient, on ramassa douze paniers pleins.
Ceux qui avaient mangé étaient environ cinq mille, sans compter les femmes et les enfants.
Encore un récit que nous connaissons bien…
Il fait sans doute partie des textes que nous citerions en exemples si nous devions citer les miracles accomplis par Jésus.
Ce texte a été écrit par Matthieu quelques années seulement après le départ de Jésus.
Mais en quoi ce texte écrit il y a deux mille ans peut-il nous rejoindre dans notre vie d’aujourd’hui ?
En quoi ce récit de la multiplication des pains et des poissons peut-il éclairer nos vies de femmes et d’hommes du vingt-et-unième siècle ?
C’est un miracle nous le croyons tous et sans doute l’un des plus visibles des moins contestables ; Mais en quoi ce miracle peut-il nous rejoindre, nous tous, ici présents ?
Pour le savoir il faut une nouvelle fois en revenir au texte lui-même et ouvrir nos cœurs tous grands pour laisser l’Evangéliste nous parler…
Il nous dit tout d’abord que, comme à son habitude, Jésus cherche à se retirer à l’écart des foules, sans doute pour prier son Père comme il le fait en de telles circonstances…
Mais ces circonstances justement, quelles sont elles ?
Dans les versets qui précèdent, Jean Baptiste vient d’être décapité par le roi Hérode…
Il est fort probable donc que Jésus est triste et qu’il veut prier pour Jean Baptiste…
Pour cela il cherche à s’isoler, mais alors qu’il pense avoir trouvé un endroit au calme, en débarquant, il se retrouve face à une très grande foule qui était sortie des villes pour venir l’attendre là…
Tous ces gens étaient en attente de Jésus.
Ils avaient entendu parler de cet homme qui guérissait tous les maux du corps et de l’esprit et attendaient beaucoup de lui, ils mettaient beaucoup d’espoir en lui.
Alors, nous dit le texte, « Il fut saisi de pitié envers eux et guérit les infirmes ».
Et nous ? Et bien oui nous… Savons nous faire ce que Jésus à fait ?
Je ne parle évidemment pas de la guérison des infirmes, quoique… Mais je parle simplement de cette façon qu’il a eu de se mettre à l’écoute des autres…
Jésus venait d’apprendre la mort de Jean Baptiste et devait être fortement peiné… Pour faire face à cette peine, il voulait sans doute se retrouver dans la prière à son Père… Au calme… sans être dérangé…
Et voilà qu’une foule se présente à lui…
Il nous arrive à nous aussi de faire des plans… de prévoir de faire telles ou telles choses, de bien programmer les instants d’une journée, d’un week-end, d’une semaine ou même de nos vacances et soudain nous voilà dérangés par des évènements imprévus… des enfants, des parents, des voisins… qui nous sollicitent et ont besoin de nous…
Les recevons-nous toujours à la manière de Jésus ?
Savons nous toujours tout laisser pour les écouter et les aider, ou trouvons des excuses pour nous défiler, nous occuper des autres le moins possible et reprendre le cours de nos activités ?
Quand nous allons faire nos courses dans les magasins des alentours et que nous rencontrons des personnes sans domicile parfois très sales c’est vrai, mais qui tendent la main pour un peu d’argent ou même simplement un sourire d’humanité…
Savons nous nous arrêter juste quelques secondes pour leur donner ne fut-ce que ce sourire comme le faisait lui-même Jésus, ou détournons nous notre regard pour ne pas être dérangés et, pour nous donner bonne conscience, en nous disant que nous donnons chaque hiver aux restaurants du cœur ou à d’autres associations du même type ?
Cet Evangile nous invite donc en tout premier lieu à nous laisser déranger par nos frères… à nous mettre réellement à leur service…
Se mettre au service des autres ce n’est pas leur donner ce dont on pense qu’ils ont besoin, mais c’est se mettre à leur écoute pour comprendre ce qui leur manque réellement et tenter de les aider à le trouver…
Si nous en revenons à notre texte nous voyons d’ailleurs que les disciples ne sont pas très différents de nous…
Arrivant en fin de journée, et ne sachant que faire de cette foule qui commence à les encombrer ils pressent Jésus de les renvoyer… « L'endroit est désert et il se fait tard. Renvoie donc la foule : qu'ils aillent dans les villages s'acheter à manger ! »
Mais Jésus voit les choses autrement « Ils n'ont pas besoin de s'en aller. Donnez-leur vous-mêmes à manger. »
Vous avez remarqué le contraste entre ces deux phrases ?
D’un côté c’est « qu'ils aillent dans les villages s'acheter à manger » et de l’autre « Donnez-leur vous-mêmes à manger ».
Cette phrase s’adresse à nous aussi…
Nous sommes, tout autant que les disciples, dans un monde où tout s’achète et tout se vend… et dans ce monde, Jésus nous demande de donner !
Mais les disciples ne sont pas idiots et tout comme nous quand nous n’avons pas envie de chercher plus loin que le bout de notre nez, ils ont une excuse toute faite : « Nous n'avons là que cinq pains et deux poissons. »
Et tout comme nous avec vos excuses toutes faites, ils espèrent sans doute en être quitte…
Ils se disent qu’en voyant cela Jésus va changer d’avis et qu’il va enfin se décider à renvoyer la foule…
Mais bien au contraire puisque que c’est justement là tout ce que Jésus attendait…
Ce que Dieu attendait des disciples il y a deux mille ans, c’est la même chose que ce qu’il attend de nous aujourd’hui…
Ce que Dieu attend de nous aujourd’hui, ce n’est pas seulement notre argent mais notre disponibilité.
Les miracles, c’est son rayon, mais nous pouvons y contribuer à chaque fois que nous sommes prêts à nous mettre réellement au service des autres.
Avec le peu que nous pouvons apporter, il est capable de faire beaucoup !
Cinq pains et deux poissons… voilà qui est dérisoire pour nourrir une foule de cinq mille personnes…. Sans compter les femmes et les enfants… et pourtant c’est que Jésus à fait ce jour là…
Et aujourd’hui, quand nous voyons la misère qu’il y a autour de nous, que ce soit au travers des journaux télévisés ou dans nos rues ; Quand nous voyons tous ces hommes, ces femmes et mêmes ces enfants qui vivent dans des conditions insupportables, indignes d’un monde qui se dit civilisé, même si cela nous attriste vraiment et sincèrement, nous nous disons qu’à nous seuls nous ne pouvons pas changer tout cela… et c’est sans doute en partie vrai…
Mais si à toutes ces situations auxquelles nous ne pouvons pas, nous ne savons par faire face, nous opposons notre vraie et sincère disponibilité, si comme les disciples nous apportons nos cinq pains et nos deux poissons, alors nous permettrons à Dieu de multiplier notre bonne volonté pour qu’elle donne des fruits bien au-delà de ce que nous pouvons même imaginer.
Dieu ne va cependant pas faire les choses à notre place… Ce n’est pas Jésus qui dans notre histoire a distribué la nourriture aux cinq mille personnes présentes mais bien les disciples eux-mêmes…
Nous ne serons donc pas quitte en mettant notre bonne volonté à la disposition de Dieu… Certes il en multipliera les fruits, mais c’est nous qu’il enverra les distribuer …
Il fera alors de nous les serviteurs de nos frères.
Notre histoire se termine par quelque chose qui peut encore nous éclairer… « Des morceaux qui restaient, on ramassa douze paniers pleins ».
Dieu donne en abondance… Avec cinq pains et deux poissons il a nourri plus de cinq mille personnes et il en est resté douze paniers pleins !
C’est une promesse, celle qui nous dit que du peu que nous pourrons et que nous saurons donner Dieu est capable de faire tellement qu’il en restera encore et encore…
Ce sont les vacances et sans doute que certains d’entre nous ont un peu plus de temps libre que d’habitude.
Sachons mettre à profit ce temps pour réfléchir à ce texte et à l’appel que le Seigneur nous lance à travers lui, un appel pressant dans le monde où nous vivons, un appel pressant à nous mettre réellement et sincèrement au service de nos frères.
Amen.