dimanche 4 septembre 2011

2011-09-04 - A - Instructions pour la vie de l'Eglise. Tout chrétien est responsable de ses frères - Matthieu - 18 - 15 à 20

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 18,15-20.


Jésus disait à ses disciples : « Si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute. S'il t'écoute, tu auras gagné ton frère.


S'il ne t'écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes afin que toute l'affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins.


S'il refuse de les écouter, dis-le à la communauté de l'Église ; s'il refuse encore d'écouter l'Église, considère-le comme un païen et un publicain.


Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.


Encore une fois, je vous le dis : si deux d'entre vous sur la terre se mettent d'accord pour demander quelque chose, ils l'obtiendront de mon Père qui est aux cieux.


Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d'eux. »

Vous le comprenez bien ce texte nous parle de pardon…

Le mot important tout au long de cet Evangile c’est le mot « frère ».

Mais qui est donc ce frère dont nous parle le texte.

Est-ce mon frère de sang, celui qui a été élevé par la même Maman ? … Pas seulement…

Est-ce mon frère chrétien, celui qui partage ma foi en Jésus mort et ressuscité pour nous sauver ? … Pas seulement…

Est-ce mon frère musulman ou orthodoxe qui ne partage par la même foi que moi mais qui croit en Dieu lui aussi, un Dieu unique qui est forcément le mien ? … Pas seulement…

Le frère de notre texte d’aujourd’hui, c’est tout homme qui fait partie de la création de Dieu, tout homme qui est aimé de Dieu autant que moi qu’il soit chrétien ou musulman, pauvre ou riche, juste ou pécheur.

J’aurais pu continuer mon homélie en vous vantant les mérites du pardon et en faisant de belles tirades qui nous auraient tous, et tous c’est moi aussi bien entendu, qui nous auraient tous fait comprendre à quel point il est important d’apprendre à tout pardonner… bien sur les petites choses, mais surtout les grosses…

Sans doute aurai-je alors été semblable à ces docteurs de la loi qui vivaient au temps de Jésus et qui prônaient des conseils qu’eux-mêmes ne suivaient pas, qui obligeaient à suivre des lois auxquelles eux-mêmes ne se soumettaient pas.

Mais voilà qu’en début de semaine, alors que je venais comme à mon habitude de lire ce texte et que je le laissais « murir » avant de tenter de vous l’expliquer, voilà qu’est arrivé un évènement qui m’a énormément secoué, un évènement, n’ayons pas peur de le dire, qui est venu mettre ma foi à rude épreuve, qui est venu bouleverser ma façon de voir ce texte et de fait le commentaire que je voulais en faire.

Soucieux de respecter l’anonymat des personnes concernées je ne vous donnerai pas même un prénom, mais il me faut quand même vous raconter cet évènement.

Mon épouse et moi avons dans notre entourage un monsieur qui est papa de jumeaux.

Il y a de nombreux mois de cela, après que le malin ait soigneusement mis à mal leur couple, ces jumeaux ont été emmenés par leur maman dans son pays d’origine, bien loin de la France où ils étaient pourtant nés entourés, je peux vous l’assurer, de l’amour de toute une famille qui ne demandait qu’à les aimer.

Je vous passe le détail des procédures judiciaires qui s’en sont suivies.

J’insisterai simplement sur le fait, et là aussi je peux vous assurer que c’est la vérité, le fait que la volonté du papa était avant tout de permettre à ses enfants d’avoir à ressentir le moins possible cette situation tragique dans laquelle son épouse et lui se trouvaient.

Et voilà que lundi dernier, contre toute attente, la justice française a tranché en la faveur unique de la maman, ne laissant au papa qu’un droit de visite pendant les vacances scolaires dans ce pays lointain.

On a beau être chrétien, on a même beau être diacre, ministre ordonné de notre Eglise, je peux vous assurer que la colère vous prend, une colère noire emprunte d’un sentiment profond d’injustice et d’un dégoût extrême de nos institutions…

J’étais alors en déplacement professionnel et de retour dans ma chambre d’hôtel le soir, je me suis tourné vers la croix avec cette question : « Pourquoi ? Pourquoi Seigneur, alors que tout l’amour et toutes les prières d’une famille chrétienne étaient tournés vers la sincère volonté du bonheur de ses enfants, petits enfants, neveux, nièces, cousins et cousines… pourquoi maintenant, une justice humaine permettait-elle que ces enfants se retrouvent loin des leurs ? »

Et dans ma chambre d’hôtel la seule réponse que j’ai obtenu c’est le silence.

L’après midi même, j’avais pu joindre par téléphone les grands parents de ces enfants… Il étaient anéantis et eux qui avaient tant prié pour que la paix de Dieu revienne sur cette situation, eux qui, comme beaucoup, avaient tant prié pour que, même si les parents ne pouvaient plus rester ensemble, les enfants puissent au moins retrouver une stabilité dans leur vie, et bien ces grands parents n’étaient même plus capables de se tourner vers la croix, non déçus de Dieu, mais vidés de leur force par une décision humaine.

En reprenant le texte de ce dimanche je me suis immédiatement aperçu qu’il m’était difficile, impossible même, après de tels évènements de me présenter devant vous ce matin avec une homélie qui n’était pas teintée de cette expérience.

« Si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute » … ca a été fait Seigneur…

« S’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soir réglée sur la parole de deux ou trois témoins » … ca n’a pas été fait sous cette forme mais pourtant, ca aussi ca a été fait Seigneur…

« S’il refuse encore d’écouter dis-le à la communauté de l’Eglise, s’il refuse encore d’écouter l’Eglise, considère-le comme un païen et un publicain. »

Mais alors que l’on pourrait penser qu’il s’agit là d’une condamnation finale, il n’en est rien…

Là où notre amour humain ne peut, pour le moment plus rien, là où notre humanité et nos souffrances atteignent leurs limites, l’amour de Dieu ne s’arrête pas…

Ce frère, cette sœur en l’occurrence, qui s’est mise en dehors de l’Eglise, il faut impérativement la regagner… Pourquoi ? Et bien parce qu’elle en a encore d’avantage besoin que les autres.

Mais me direz-vous : « Qu’est-ce que vous faites de la souffrance du papa et de tous ceux qui l’entourent ? Doit-il se contenter d’une décision injuste et souffrir en silence en se soumettant ? » Bien sur que non !

Bien sur que non, je ne l’oublie pas…

Et bien sur que non, il ne doit pas baisser les bras…

Si la justice des hommes doit se prononcer c’est parce que le mal est présent et notre devoir de chrétien est aussi de le dénoncer aux yeux des hommes.

Ce mal nous le connaissons bien : C’est l’argent, l’orgueil, le mensonge, l’égoïsme, le manque de morale, etc… etc…

Ce sont là des maux qui font souffrir les hommes, les femmes et en l’occurrence surtout les enfants de notre temps, des maux qu’il nous faut dénoncer et condamner.

Cependant, même si nous devons combattre le mal dans nos sociétés, nous ne devons pas oublier que ce frère qui a péché est toujours un frère, un frère malade certes, un frère qui s’est éloigné du juste chemin c’est vrai, mais un frère quand même.

Pour Dieu il n’y a pas de situation désespérée…

Il me faudra sans doute encore un peu de temps pour faire passer complètement ma colère, et c’est dans la prière avec l’aide de l’Esprit Saint que je pourrai retrouver mon calme.

Il faudra peut-être encore d’avantage de temps pour que ce papa puisse revoir ses enfants… Il lui faudra peut-être également un peu de temps pour pouvoir à nouveau se tourner vers Dieu avec sérénité.

Pourtant c’est bien en Dieu que se trouve la solution.

Lui seul peut nous aider à supporter la souffrance et à continuer ce combat contre le mal.

Lui seul peut, contre toute imagination humaine, ramener notre frère de l’ombre à la lumière.

Le chant nous le dit « Aujourd’hui, ne fermons pas notre cœur, mais écoutons la voix du Seigneur ».

En ce jour, nous te prions Seigneur.

Aide nous à ne pas sceller la porte de notre cœur avec le feu de notre souffrance.

Aide nous à laisser allumée la veilleuse de l’amour que ton Esprit pourra raviver.

Aide nous à renouveler notre confiance en toi malgré les épreuves afin que comme le Christ notre Seigneur nous puissions apporter le salut à nos frères.

Amen

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